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vendredi 23 mai 2014

n° 72 : Super twingo : un coup de pompe !

Connaissez- vous Super Twingo ?
C'est celle qui passe partout, ici. Qui parvient à grimper et à descendre des côtes remplies de trous. Qui slalome entre les zébus et le piétons nocturnes. Qui se gare dans des trous de souris, au bord de n'importe quelle route (car pratiquement pas de places de parking à Mayotte).
Elle est devenue notre véhicule indispensable.



Sauf que.
Sauf qu'aucune voiture n'est bien sûr à l’abri d'une panne !

"Une histoire de panne de bagnole ?!!!!! C'est ça qu'il veut nous raconter" me direz-vous.
"Mais c'est d'un banal !"
Eh, non ! Pas ici !
Et je ne pense pas qu'un seul d'entre vous ai déjà vécu une journée comme celle-ci en métropole pour une simple panne de voiture.

Voilà l'histoire :

Un ami en vacances (appelons-le Phil), son épouse, tout aussi en congé (nous l'appellerons Maria), et moi-même décidons d'aller faire quelques courses un samedi en fin de matinée dans la préfecture de l'île : Mamoudzou.

Comme il y a deux routes pour s'y rendre, je choisis celle que je n'emprunte jamais, mais qui offre les plus beaux panoramas sur l'intérieur de Mayotte. Mauvaise idée, car ce n'est qu'une succession de trous assez profonds. J'en évite trente et tombe dans le trente et unième. Ça fait un grand "clac!".
A la suite de ça, la voiture ralentit et semble vouloir rester sur place. Mince ! Encore crevé !
Mais non, ça n'est pas ça ! La roue a tenu.

Mais le moteur est arrêté et nous sommes au milieu de la route. Contact, tentatives de redémarrage, rien n'y fait ! La batterie est active, mais l'essence semble ne plus arriver. L'alternateur, sans doute.
Je dis ça, mais je n'y connais rien en bagnole ; j'essaie juste de faire celui qui sait un peu. Ceux qui me connaissent savent que je vais avoir des ennuis que je ne pourrai résoudre moi-même...

Il faut dégager la route au plus vite. Quelques demoiselles revenant de laver leur linge à la rivière nous proposent de nous aider, tout en rigolant. Non, merci ! Nous allons pousser nous-même jusqu'au premier terre-plein. Super Twingo est légère. On y parvient sans mal.

Bon ; on est en pleine cambrousse ; il est samedi après-midi déjà bien avancé, et on est un peu dans la m...

Je me dis que ça ne va pas être simple...
Après plusieurs coups de démarreur, nous décidons de ne pas insister et d'appeler la compagnie d'assurance pour qu'elle m'indique la marche à suivre pour un dépannage.
Pour une fois, j'ai mes papiers et la carte jaune de l'assurance. Un coup de bol.

Coups de téléphone, maintenant. Et là ça va vite : contact avec l'entreprise de dépannage.

Mais c'est samedi : "D'accord, on passera dans une heure (c'est à dire trois en langue mahoraise) vous remorquer ! On risque de vous garder la voiture une petite semaine ( un mois en mahorais) le temps de trouver la panne et la pièce".
Je vois bien les ennuis se profiler, mais comment faire autrement ? Tant pis ; je louerai une voiture.

L'attente au bord de la route commence.
Quand Phil a la bonne idée : il laisse le capot de la voiture ouverte, histoire de bien signaler que nous sommes en panne.

On se met à l'ombre, car ça tape, et on attend. L'idée que ça va être long. On commence à avoir faim et soif. On ne mangera pas ce midi, c'est certain !

Quand une voiture s’arrête.
Un gars dit connaître le garagiste du prochain village. Il va nous le ramener et il va regarder à la voiture. J'y crois à moitié. Et on continue d'attendre.
Les lavandières de tout à l'heure repassent et viennent clairement nous faire du gringue en gloussant : "Ça va les garçons ? Vous voulez de l'aide ?" "Non merci, mesdemoiselles !" Nouveaux gloussements.

Maria se met à l'ombre. Et une seconde voiture s'arrête ; pleine comme un œuf ! C'est un taxi  : une Clio remplie au max de ses capacités. Le chauffeur en descend et vient s’inquiéter de notre sort.
Les passagers ? Ils attendent. Des m'zungus en panne, c'est prioritaire !
Et personne ne râle dans le taxi stoppé sur le bord de la route.

Le taximan ausculte SuperT : il démonte l'arrivée d'essence, en met partout sur sa chemise sans ciller. Il aspire le liquide, en a plein la bouche ; pas de problème !
Diagnostique :  c'est la pompe à essence ; elle est morte. Il faut la changer ! Il va en trouver une sur le champ ; il est "un peu" mécano.
On se regarde avec Phil ; quelques secondes pour se décider : on attend sagement la dépaneuse ou on s'en remet à notre taximan/ un peu mécano/ grand tchatcheur ?
Situation inédite pour moi.
Après un bref échange de regards, on décide de confier notre avenir proche au taximan. Banco !

Mais il faut que quelqu'un monte avec lui dans le taxi pour aller acheter la pièce ; quelqu'un qui a une carte bleue dans sa poche de préférence. Maria décide d'emblée d'y aller. Go !
Mais la petite Clio est bondée. Pas de problème : le taximan fait sortir un des passagers ; il me demande de lui filer 1,50 euro de dédommagement (le prix d'une course ici). Et Maria prend sa place dans le taxi.
"On est là dans une demi-heure !" "Tu parles !" Le taxi part. Le passager éjecté est redevenu un piéton.

Phil et moi attendons la dépanneuse pour signifier au chauffeur que nous n'avons plus besoin de ses services. Comment va-t-il prendre la chose ?

Pour la suite de cette histoire, je m'en remets donc au récit de Maria qui a vécu là un moment inoubliable, et, d'après ses paroles,  "très intéressant" :

Le taxi roule à fond les manettes. Ça n'est pas parce qu'on est six dans une Clio, que ça va la freiner !
En un temps record, c'est l'arrivée à Mamoudzou.
Le magasin de pièces détachées est ouvert. Et il y a une pompe en stock. Sauf que ça n'est plus 70 euros, mais 100. Maria et le taximan négocient avec le vendeur. Ça sera donc 70. Et puis c'est tout ! Bien joué, Maria !

A nouveau le pied au plancher dans Mamoudzou ; on joue "Taxi 4" ! Les deux bouenis (femmes) sont déposées au marché. Ouf ! Chacune avait environ le double du volume de Maria !
Et direction la zone artisanale de Kaweni.
Car notre taximan a des trucs à faire entre temps. Vous ne vous imaginez pas qu'il va faire un aller/ retour comme ça !
A Kaweni, chargement d'une quinzaine de fers à béton de 3 m de long dans la Clio.
"Mais ça ne peut pas rentrer" me direz-vous ! Bien sûr que si !
Il suffit de prendre deux ouvriers, de poser un bout de carton sur le toit de la voiture et de leur faire tenir avec la main droite les fers à béton sur le toit. (Y a pas de galerie, bandes de naïfs que vous êtes !).
Pas compliqué, quand même !
"Et la police ?"
" La quoi ? "Si vous croyez que c'est un problème !"
Deux passagers qui étaient là depuis le début descendent ensuite.

Mais quinze fers à béton sur une route défoncée, ça n'est pas facile à tenir. Par deux fois, ceux-ci tombent sur la route dans un feu d'artifice d'étincelles. Pas grave ; on recharge et  le voyage continue.

Mais à l'abord des rues étroites du bidonville, il faut bien se résoudre à lâcher la cargaison, qui est balancée au bord de la route. On la reprendra tout à l'heure.
"Mais qu'allaient donc t-ils faire dans un bidonville "
"Y chercher un mécano, tiens ! Car notre taximan n'est pas certain de tout savoir remonter."
Le mécano monte dans le taxi avec son énorme tournevis qui impressionne Maria.( J'ai bien dit "tournevis"!...)
Et c'est parti pour une petite "visite" du plus grand bidonville de France. La Misère totale ; rien à envier au Brésil : les gosses qui jouent dans les poubelles; la crasse omniprésente ; un dédale de ruelles sans possibilités d’accès pour d'éventuels secours ! Il faut le voir pour le croire !

Enfin le taxi sort de Kaweni. Reprise des ferrailles. Et direction Passamenty.
Mais pourquoi se promener avec des ferrailles à bouts de bras et en voiture ? Parce que les deux ouvriers sont des maçons qui travaillent sur la maison du taximan. Et comme tous les ouvriers du bâtiment ici, ils ne sont pas déclarés et probablement immigrés en situation irrégulière. Donc, pas trop le droit d'ouvrir leur bouche pour critiquer le mal de bras dans le transport de fers à béton.

Maria se retrouve donc avec le mécano et notre taximan préféré qui lui demande "si il peut rouler vite maintenant ? " Ah bon ! Parce qu'avant, c'était "pas vite". Maria répond "oui "
Aïe ! C'est à tombeau ouvert qu'il se précipite maintenant sur la route du retour.
Mais tout en discutant ; il est taxi !
Sachant que Maria est infirmière, il oriente la conversation sur un sujet qui le préoccupe : " Où peut-on se procurer sans ordonnance ces petites pilules bleues qui servent à jouer avec les filles ?
" Du Viagra donc!"  Maria ne se démonte pas et lui indique que pour "jouer avec les filles", il faut quand même s'assurer que le cœur tienne, et qu'une prescription médicale est nécessaire.
Il acquiesce; on en restera là pour cet AM, car le taxi approche de son point d'arrivée.

Mais que font "les garçons" pendant ce temps ? Ils n'ont pas succombé aux charmes des comoriennes ; non, non ! Il ont attendu la dépanneuse qui est venue. Le chauffeur a pris acte et est reparti sans s’énerver du tout pour ce déplacement inutile. Pas grave ! Entre temps, un second mécanicien auto est arrivé ; celui que nous avait promis le premier automobiliste. Il est reparti tout aussi placidement quand on lui a dit qu'on n'avait pas besoin de lui.

Et le taxi est arrivé !!! Il nous a ramené Maria, sa carte bleue et la pompe à essence, surtout !
"Raté !" a dit Phil .

Pompe qu'il va falloir maintenant remonter ! Eh, oui !
Mais ça ne rentre pas bien ; ça résiste au remontage. Qu'à cela ne tienne ! Nos deux "mécanos (?)" s'engouffrent dans la maison la plus proche pour réclamer de l'eau, un couteau, un briquet. Les portes de ces maisons inconnues s'ouvrent sans mal. Je soupçonne qu'il s'agit de clandestins, et qu'ils n'ont pas intérêt à critiquer.
On s'active dur autour de super Twingo. Les deux gars ont de l'essence sur leurs vêtements, mais il s'en f... pas mal. Contact ! La voiture démarre au quart de tour ! Eurêka ! Bravo les gars !
Je mets une rallonge à la somme demandée. Le tout est bien moins cher que ce que m'aurait coûté le garage. Et bien plus rapide. Tout le monde est gagnant.  On a eu du flair.
Du coup, comme il nous reste un peu de temps.... on va faire nos courses à Mamoudzou. Mais bien plus piano que notre taxi qui, lui,  n'a pas fini sa journée,  et est prêt pour d'autres allers et retours .
C'est Mayotte !

A bientôt pour d'autres aventures.










5 commentaires:

  1. Génial l'article.
    En tout cas, je le redis: laisser partir Maria avec des gens inconnus alors que les 2 garçons restent à l'ombre et se font draguer par des comoriennes, il y a quelque chose qui cloche. Non!!!!
    Moi je dis ça, je ne dis rien!!!

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  2. Pour ceux qui ne savent pas encore bien décrypter les paroles féminines, je peux traduire les propos de Françoise, si vous voulez. Et ça donne :
    « Je ne me suis jamais inquiété pour Maria, car je savais pertinemment qu’elle ne risquait rien. Par contre, le fait que nos deux mecs se soient fait draguer par de jeunes comoriennes, ça a le don de m’énerver prodigieusement !!! »

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  3. Je crois connaitre l anonyme du 23 mai a 19 h18
    Nos corps de rêve ne peuvent que séduire les jeunes lavandières en recherche de sensations nouvelles

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    1. J'ai l'impression que certains hommes ci-dessus cités sont d'une prétention sans pareille.
      D'autre part, Je me suis réellement inquiétée pour Maria.
      Pourquoi ne jamais vouloir reconnaître ses erreurs???
      Bisous aux hommes aux corps de rêve... Hihhi

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  4. Impressionnante histoire... il fallait en effet avoir le courage, ou le nez creux, pour s'en remettre aux mains du taximan local. Je pense que Maria, que je ne connais pas mais enchantée, a dû avoir peur par moment dans ce périple!!! Messieurs j'espère que vous n'avez pas eu trop chaud ou trop soif en attendant....
    Ce qui compte c'est la santé de super twingo...
    Gros bisous
    Véro

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