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vendredi 20 janvier 2017

n° 133 : Pénurie d'eau à Mayotte. Comment ? Pourquoi ?

Depuis le 15 décembre, la moitié des communes de l’île, celles du sud, dépendantes de la retenue collinaire de Combani, ne peuvent ouvrir leur robinet qu’un jour sur trois. C’est à dire qu’il faut anticiper pour les douches, les déplacements aux toilettes, fermer les écoles, économiser les lavages des mains…

Ce qui serait insupportable en métropole est vécu ici comme une fatalité. Une de plus.
Imaginez vos activités quotidiennes pendant un jour sans eau alors qu'il fait 30°. Ici c'est deux jours d'affilée ; et cela dure depuis plus d'un mois.
Alors on stocke pendant le "jour d'eau". Dans des bidons, des bouteilles. Une eau qui n'est pas potable. Le pire est que ça risque de durer. La saison des pluies tarde à venir. Il pleut un peu. Mais il n'y a pas de quoi alimenter la retenue dans laquelle l'eau est puisée. Elle n'est pleine qu'à hauteur de 15% de sa capacité. Les restrictions permettent seulement de maintenir ce pourcentage minimum. Si le kash kazi (saison des pluies) n'arrive pas avant un mois, quelques centaines de milliers de personnes vont être mal ; très mal !...

La retenue de Combani ressemble de plus en plus à une flaque
  Les adultes célibataires dans mon genre se débrouillent. Mais les familles avec enfants ont du mal.
Quant aux établissements scolaires, ils font aussi avec.
Les lycées et collèges ont été approvisionnés en bouteilles d'eau. Leurs toilettes ont été raccordées sur des citernes, pour la plupart.
Le problème majeur concerne le premier degré. Les écoles élémentaires et maternelles. Elles sont fort nombreuses. Et les mairies, très largement endettées, ne peuvent pas se payer de citernes.
Alors, encore une fois, on se débrouille.
Certains maires ont gardé les école fermées depuis la rentrée.
D'autres les ont ouvertes partiellement. C'est le cas de la mienne, à Chiconi. L'école ouvre à 7H et est fermée dès 10H30. Pour le restant de la journée. Le compte d'heures hebdomadaire n'y est effectivement pas.
Et les habitudes doivent être modifiées.
Des seaux pour le lavage des mains. D'autres seaux pour les toilettes. Le tirage de la chasse n'est plus qu'un souvenir...











Le moins simple est de faire attention que les petits ne boivent pas une eau qui n'est pas potable.
Les intestins de petits mahorais en ont vu d'autres, je sais bien. Mais les maux de ventre sont récurrents ici.

Pourquoi cette crise de l'eau ? Grande question. N'imaginez pas l'île poussiéreuse et sèche comme un désert. C'est vert. très vert, même. Car il pleut plusieurs fois par semaine. Mais pas assez. Pas assez pour subvenir aux besoin d'une population qui augmente à une vitesse folle.

Alors d'où vient le problème ?

D'une part, qu'il n'a pas plu assez. C'est un fait. L'est de l'océan indien est en pleine mousson (Chine Inde, Indonésie). L'ouest est ignoré de la pluie pour le moment (Comores, Madagascar, Mayotte, Réunion, Maurice, Seychelles, etc..) La pluie devait tomber drue. Elle se fait attendre et le grand bleu domine.


Mais ce retard n'est pas seul en cause. Tout cela était largement prévisible. On est passé tout prêt de cette situation l'an dernier.
 Dés 2013, le Projet d’Action Stratégique de l’État à Mayotte évoquait  la nécessitée de construire une troisième retenue collinaire ainsi qu’une usine de dessalement dans le Sud de l’île pour prévoir les éventuelles pénuries si un jour la saison des pluies venait à trop tarder. Cette attention particulière du PASEM faisait suite…aux conclusions préventives de l’assise de l’eau organisée par le Syndicat des eaux l’année précédente, c’est-à-dire dés 2012.
Une fois de plus, aucune anticipation. Ou si peu.

Il va bien pleuvoir un jour ; c'est certain. Mais en attendant tous les habitants du Sud regardent le ciel. Ils commencent à pester contre ceux du nord qui ne sont pas encore concernés. Et qui continuent à gaspiller l'eau, souvent au mépris de la loi. (L'arrêté préfectoral s’étend au territoire entier. Pour l’usage domestique, le lavage des véhicules, camions, engins de chantier, voiries et trottoir est interdit. Il en est de même pour les bateaux de plaisance. L’arrosage des jardins potagers n’est autorisé qu’entre 0h00 et 18h. Le remplissage des piscines est interdit (privée ou publique) même pour les établissements touristiques. La fabrication de béton est interdite hors centrale à béton. L’agriculture et l’industrie sont également touchées par ce nouvel arrêté).

Malgré cela, les chantiers de construction continuent sans vergogne ! Tant que le gendarme de l'eau ne sanctionne pas, beaucoup continuent leurs activités en se fichant pas mal de ce que vivent les autres.

L'eau est rare. Donc précieuse. Nous le vivons concrètement ici.
le plus grave ne serait pourtant pas qu'elle tarde à tomber. Ce serait que l'on oublie, et que la même situation se reproduise l'an prochain. En pire.



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