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mercredi 12 mars 2014

n° 60 : Le Grand Mariage

Samedi dernier, Françoise était invitée à un mariage mahorais. Pas de chance, elle n'était pas encore à Mayotte. A un mois près, elle aurait revêtu son salouva et son kishal, tenue mahoraise que toutes les femmes portent ici.
Vous pensez peut-être que je suis donc allé au mariage sans elle ; que non ! Car je n'y étais pas convié !

A Mayotte, tout participant à un grand mariage a le droit de demander à une seconde personne de l'accompagner ; c'est ce qui s'est passé ici : mon assistante maternelle a invité Françoise, car moi, je suis un homme, et je ne pouvais pas être invité par une femme.

Je me suis quand même renseigné pour savoir comment se déroule le grand mariage.

Le  «Grand Mariage» (ou «Haroussi») ,est une fête exceptionnelle d’une durée d’une semaine qui, en plus de sceller – une deuxième fois- l’union d’un couple, est l’occasion pour les familles concernées et particulièrement celle du mari de montrer à tout le village, sinon à toute l’île, sa richesse
Une «deuxième fois» parce que ce couple s’est d’abord - et souvent plusieurs années avant qu’il puisse réunir l’argent pour célébrer cette fête – marié sans faste.
 De la réussite de cet événement majeur, qui dure une semaine durant laquelle des dizaines de personnes (famille, amis et habitants du village du marié) sont invitées tous les jours à festoyer, dépend l’image même des familles concernées.
 Les dépenses engagées sont exorbitantes : plus le mariage est coûteux, plus les familles qui le fêtent sont couvertes d’honneur ! Par exemple, si les invités sont très nombreux (deux cents et plus), il faut acheter plusieurs zébus qui coûtent 3000 à 5000 euros pièces !

Voici toutes les phases de cette semaine de festivités  :

Les préparatifs :
Durant une semaine les femmes mahoraises ont donné toute leur énergie, tout leur temps a été consacré aux «préparatifs» : réunir la dot, préparer les différents endroits où se déroulera la fête, contacter les femmes chargées des agapes, trouver les vêtements de fête 

 

Le jour « J » les hommes s’impliquent aux préparatifs : ils tuent le zébu et le cuisent. Pas dans un abattoir, mais dans un jardin ou endroit reculé, car c'est interdit ; enfin normalement, car en terme de règles sanitaires, la réglementation française est loin d'être appliquée...



 

Pendant une semaine les femmes ont fait des kilos de gâteaux,  plats : pilao, bred cocos (cuire des feuilles de différentes plantes), manioc, bananes cuite, mataba (feuilles de manioc et lait de coco), les sauces pour le zébu…


Tôt le matin les femmes commencent donc la cuisine ; et souvent avec un fond sonore très élevé qui profite à tout le monde grâce aux haut-parleurs.

Une anecdote récente et originale : la femme du chef de gendarmerie a porté plainte ce w-e pour tapage nocturne en raison de festivités hautes en couleurs et en sons surtout. Il ne s'agissait pas d'un mariage, mais d'une commémoration traditionnelle musulmane. A suivre...

L’attente de la mariée

Durant huit jours, la mariée est dans la maison que lui a construite sa famille ou que lui a cédée sa mère, dans sa chambre, sur son lit (souvent à baldaquins), maquillée et habillée le plus fastueusement possible. Elle reçoit la visite des invités et n’a en aucun cas le droit de mettre le nez dehors !

La réunion des hommes

La première des festivités du « Grand mariage » est une réunion exclusivement réservée aux hommes qui chantent des mélodies religieuses évoquant la vie du prophète.

La marche nuptiale

C'est l’une des festivités majeures du « Grand Mariage ».
Elle se déroule, dans les rues des villages. Il s’agit d’accompagner – très lentement ! - le marié chez sa femme qui l’attend, toujours sur son lit. Un cortège d’hommes et de femmes. Le cortège d’hommes est positionné devant le marié encadré par ses « témoins », lui ouvrant le chemin en chantant et dansant. Entêtant et lancinant ! Le marié et ses deux amis (ou frère et père) sont parés d’habits somptueux qui rappellent l’élégance des sultans. Protégés sous des ombrelles, rafraîchis par des éventails que trois femmes agitent devant eux en marchant à reculons.
 Les femmes forment derrière ce cortège un groupe qui chante et danse .
Parmi elles, deux ou trois femmes  exhibent à bout de bras les parures de bijoux de la mariée et la dot dans une petite valise.

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L’arrivée chez la mariée et le festin

Après une courte prière de l’Imam au seuil de la porte, le marié pénètre dans sa nouvelle maison et rejoint son épouse dans sa chambre. Des cris de joie ponctuent cette étape.
Dans la cour de la maison, des nattes ont été étendues sur le sol. Dans un coin sont entassés tous les cadeaux en appareils ménagers offerts par le mari à sa femme – sans papier-cadeau pour que tout le monde puisse voir précisément leur contenu ! Du vulgaire balai à la télé à écran plat ! Des femmes appartenant au Shama arrivent de toutes parts avec d’immenses marmites, plats, coupes de fruits. Un notable ou le cadi prend la parole pour évoquer la généalogie des deux familles et annoncer la dot.
Puis c’est le festin, ponctué de chants et de danses, qui se terminera très tard dans la nuit.
Ces réjouissances clôturent les festivités nuptiales !




1 commentaire:

  1. Je n'y étais pas, mais j'ai quand même porté mon salouva et mon kischal si gentiment offerts par Roukia. Une belle expérience ratée, un peu déçue... Peut-être une prochaine fois...
    Bisous

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